Honorer la victime et renforcer la lutte contre le terrorisme islamiste

L’attentat terroriste de Conflans Sainte-Honorine - car cet horrible assassinat d’un enseignant par décapitation est un attentat terroriste - soulève l’indignation. Il faut s’en féliciter : la société française, dans son immense majorité, et par-delà les fractures qui la parcourent, se lève face à la barbarie inouïe qui a conduit au meurtre de Samuel Paty. Et chacun perçoit bien qu’au-delà de l’émotion et des mots, de nouvelles actions seront nécessaires contre le terrorisme islamiste.

Car nouveau cap a été franchi : dans l’horreur, mais aussi dans la volonté de semer la terreur. Beaucoup d’enseignants se posaient déjà la question de ce qu’ils pouvaient encore dire dans leurs cours. Samuel Paty lui-même proposait aux élèves musulmans de sortir de la salle de classe quand il montrait les caricatures de Mahomet. Le but de cet attentat est bien de semer la terreur dans les écoles, collèges, lycées et particulièrement parmi les enseignants pour modifier le contenu des enseignements.

Qu’une réaction d’émotion et d’indignation s’exprime à travers des manifestations spontanées partout en France, c’est légitime et souhaitable. Qu’y participent ou y appellent des responsables politiques qui par ailleurs ont systématiquement minimisé la menace terroriste ou qui ont défendu l’idée la laïcité ne devait plus être défendue, passons. Le large rassemblement face à l’horreur vaut bien de passer là-dessus.

En revanche, il est clair que l’on ne peut pas se contenter de cela.

Au-delà des mots - et ceux du Président vendredi soir à Conflans furent justes et forts, il faut une action politique déterminée et multiforme.

Évidemment, à peine l’émotion retombée - et elle retombera vite (que reste-t-il des manifestations monstres du 11 janvier 2015?), les mêmes reprendront leur combat pour que le nous les responsables politiques, notamment les législateurs, nous ne fassions rien.

Nous avons connu cela après les attentats de 2015 quand nous avons voté la loi renseignement ou l’état d’urgence – cette loi renseignement, dont aucune des « dérives attentatoires aux libertés » qui nous étaient annoncés à grand renforts de pétitions et de tentatives d’intimidation – déjà – via messageries ou réseaux sociaux ne s’est concrétisée. Mais une loi renseignement qui a permis, grâce aux dispositifs de suivi et d’écoutes légalisés, d’éviter de nombreux attentats.

Vont s’opposer à une action plus forte la quasi-totalité de la gauche et des Verts, appuyés par beaucoup de journalistes - Mediapart, Le Monde, Libération en tête mais aussi sur le service public de la radio et de le télévision.

Cela ne doit pas nous faire reculer.

Certains vont alimenter les polémiques sur « les failles du renseignement » pour rejeter la responsabilité sur l’Etat et ceux qui gouvernent. En oubliant, encore une fois, les 32 projets d’attentats déjoués depuis 2017, grâce à un arsenal législatif et technique auquel ils s’étaient systématiquement opposés : rappelons-nous que c’est sur ce terrain – celui du refus d’armer nos services de renseignement des dispositifs indispensables à leur mission – que l’extrême droite et une partie la gauche s’étaient retrouvés au Parlement, par leur vote contre la loi, mais aussi dans une conférence de presse commune !

Cette agitation pavlovienne ne doit pas nous faire dévier de notre route, nous citoyens et responsables politiques qui voulons que l’Etat remplisse pleinement sa mission de protection des citoyens contre toutes les menaces, intérieures et extérieures.

Il faudra examiner et adopter le projet de loi du gouvernement pour la laïcité et contre les séparatismes (quel qu’en soit le titre !) sans accélérer le calendrier peut-être, mais sans le reculer une nouvelle fois non plus.

Il faudra reprendre le travail législatif censuré par le conseil constitutionnel pour prévenir la récidive en sortie de prison de personnes condamnées pour terrorisme.

De la même façon pour sanctionner les propos haineux, mensongers, diffamatoires et menaçants sur internet, il faudra déposer une nouvelle proposition de loi pour remplacer ce qui a été là aussi censuré par le conseil constitutionnel.

Et s’il le faut, nous devrons modifier pour cela la Constitution. Je suis sûr que les Français ne nous le reprocheraient pas.

Comment peut-on laisser être diffusés sur internet en toute impunité les adresses, les adresses mail et les numéros de téléphone d’une personne quelle qu’elle soit ? Comment peut-on laisser faire le harcèlement sur les réseaux sociaux ? Il serait par exemple intéressant de savoir combien de personnes ont été poursuivies et condamnées parmi celles qui avaient menacé la jeune Mila…

Il ne devrait pas être nécessaire pour un citoyen de se lancer dans des procédures judiciaires longues, coûteuses, incertaines pour faire valoir ses droits les plus élémentaires. Des systèmes de contraventions immédiates seraient beaucoup plus dissuasifs et efficaces à court terme pour les personnes menacées.

La question des expulsions rapides de personnes qui ont obtenu un titre de séjour, notamment au nom du droit d’asile, et qui font montre d’activisme menaçant ou qui commettent des délits ne devra pas être éludée non plus.

Au-delà de l’émotion et des hommages, il faut agir pour que le vivre-ensemble avec les valeurs de notre République - liberté, égalité, fraternité, laïcité - ne soient plus de vains mots.

J’agirai dans les semaines qui viennent pour que les députés de la majorité et ceux de l’opposition qui le souhaitent puissent voter des mesures législatives nouvelles, nécessaires pour mener ce combat de longue haleine contre le terrorisme islamiste, le séparatisme et le communautarisme.